Luisanna Quattrini

Née en 1972 à Lima, au Pérou. Vit et travaille à Bâle en Suisse.

On  sait  depuis  longtemps  qu’une  partie  de  notre  activité  psychique échappe  à  notre  contrôle.  Quand  elles  affleurent  à  la  conscience,  les images qui en sont la manifestation se caractérisent par leur insaisissabilité, leur propension à se dissoudre. Les tableaux de Luisanna Quattrini sont issus d’une  attention  sensible  à  cette  évanescence. Ce qu’on y voit ou, plus souvent,  ce  qu’on  y  entrevoit  semble  sur  le  point  d’apparaître  ou  de disparaître. L’univers visuel de Luisanna Quattrini est celui d’une instabilité fondamentale, celle de l’aquatique. Au flou initial succède chez le regardeur l’idée d’une image, d’une scène qui s’esquisse, d’une allusion qui s’évapore. Des personnages quasi informes, animaux ou silhouettes humaines, émergent des légers voiles de couleurs diaphanes qui flottent sur la toile. Ce sont des créatures  à  peine  élaborées,  de  fugaces  «  émergences-résurgences  », d’étranges  situations  oniriques.  Leur  brève  coalescence  permet  de  les apercevoir sans les cerner, de croire les reconnaître sans les identifier. Avec Luisanna Quattrini, la peinture procède d’une expérience mentale qu’elle propose au regardeur de partager. Elle s’adresse à une communauté de rêveurs à l’affût sur les lisières de l’inconscient, là où l’imagination franchit le gué vers l’insu. Parfois, la peinture semble prendre le dessus sur l’image. Ce sont des piles ou des amoncellements qui bâtissent alors les tableaux. On dirait qu’il s’y joue une joie du premier jour. Comme si l’inquiétude des rêves avait cédé place au simple éclat des couleurs, à une conscience éblouie.

Christian Bernard